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Confidences d'Alex
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  • Chronique de la sexualité du jeune Alex. La sexualité ambigüe de son adolescence, ses inhibitions, ses interrogations, ses rêves, ses fantasmes, ses délires, ses aventures, ses expériences.
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21 juin 2007

079 Le tir à l'arc (4° partie)

   " Tu es le premier à qui je vais raconter mon histoire, me dit Robin. Jusqu’à présent je concentrais tous mes efforts sur l’oubli. J’essayais de faire mon deuil de ce qui ne sera jamais plus, de ce qui relève irrémédiablement du passé et que je n’ai aucune chance de retrouver un jour. Je voulais me concentrer sur le présent, donner toute mon énergie à me construire une vie, si possible heureuse, avec les nouveaux paramètres. Mais je n’y arrive pas toujours. Le passé, tout ce qui est mort, remonte à la surface et me submerge. Je me noie dans tout ce qui a fait ce que je suis devenu. Je suis encore prisonnier de mon passé. C’est ce qui me rend incapable de jouir du présent. La nostalgie des paradis perdus, dans la joie et aussi dans la souffrance, m’égare dans l’irréel, dans un temps qui est mort. Je dois me réconcilier complètement avec ce qui est, maintenant.  Je perds trop de temps à me retourner au lieu d’aller toujours de l’avant. Pendant que je perds ce temps, la vie passe. Il faut que je m’imprègne de ce poème bouddhiste qui dit qu’il faut apprendre à vivre comme si l’instant le plus important de ta vie était celui que tu vis en ce moment même, et que les personnes qui comptent le plus, ce sont celles qui sont en face de toi. Car le reste n’existe tout simplement pas.

 Crois-tu que je puisse t’aider, Robin ?

 Peut-être que de te raconter m’aidera à exorciser mes démons, et à accepter ce que je considère encore comme inacceptable.

 J’ai remarqué que tu avais une volonté de fer. Je suis sûr que tu domineras tout ce qui te bouleverse actuellement.

 Je me suis engagé dans l’armée à 18 ans. Je n’aimais pas les études. Il m’aurait fallu du concret alors qu’on me baladait tout le temps dans la théorie. Mes parents n’ont pas voulu me laisser partir en LEP pour apprendre un métier. Ils disaient que je valais mieux que ça, que c’était pour les cancres, que je rencontrerais là-dedans une jeunesse à la dérive, etc, etc… c’est l’idée qu’ils se faisaient du LEP à tort ou à raison. J’ai donc passé mon bac, sans enthousiasme, et comme j’en avais marre des reproches de mes parents, et de leur déception d’avoir un fils incapable de faire des études supérieures comme eux, je me suis engagé.

J’aurais plein de choses à dire sur l’armée, mais ce serait trop long. Je vais faire bref.
Et puis est arrivé le conflit yougoslave et je suis parti là-bas comme casque bleu. J’ai fait partie des 14000 casques bleus envoyés en Bosnie-Herzégovine pour empêcher les Serbes et les Croates de se massacrer. Notre rôle était tel qu’il n’empêchait d’ailleurs rien du tout et cette mission de maintient de la paix s’est soldée, on le sait, par un échec. Il a fallu l’intervention de l’Otan, principalement des américains, pour faire cesser les combats.
Veux-tu que je te raconte les horreurs dont j’ai été le témoin ?

 Non merci. Je sais les abominations dont l’homme est capable quand il n’y a plus le frein des interdits. Je pense, hélas, qu’il n’a pas évolué et qu’il est toujours un barbare.

 Ces scènes atroces me reviennent tout le temps. Il y a des choses que tu ne peux pas oublier. Au moins faudrait-il parvenir à les enfouir dans les profondeurs de la mémoire. Les casques bleus auraient voulu aider le peuple bosniaque, parce qu’ils voyaient bien qu’il était victime de la haine, de la soif de domination des Serbes, et le besoin d’exterminer tout ce qui n’était pas eux. Mais ils avaient l’ordre de ne pas intervenir. Il fallait regarder les gens se faire tirer dessus sans pouvoir faire quoi que ce soit. Des gens qui parlaient la même langue ! Absurdité, absurdité absolue, comme dans l’œuvre de Samuel Beckett. Mais ici il y avait des morts, plein de morts, et plein de blessés, et plein de gens transformés en zombis.
Mitterrand est venu à Sarajevo. C’était le 28 juin 1992. Il a été accueilli en héros. Il est arrivé avec des soldats et deux porte avions américains à proximité en mer Adriatique. Enfin on allait faire autre chose que regarder et ramasser des morts et des blessés. Mais Mitterrand n’a rien fait d’autre que de laisser continuer à ne rien faire. Au nom d’une vieille amitié franco-serbe peut-être. Il est reparti comme il était venu et les porte avions aussi.

Mais je me laisse emporter, ce n’est pas ce que je veux te dire."

A suivre...

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Commentaires
M
Il est encore plus dur en vacances de trouver du temps pour s'occuper de ces petites publications bloguesques qu'en temps ordinaire. <br /> La suite, donc, la voici.<br /> Je n'ai pas relu. Gare aux imperfections !<br /> <br /> Biz<br /> <br /> Mathys
M
C'était une piste pour la suite, en effet. Mais la réalité en a décidé autrement.<br /> En tout bravo pour l'astuce : la flèche d'amour du tireur à l'arc.<br /> <br /> Biz<br /> <br /> Mathys
P
... suivons donc, puisque c'est à suivre.
J
aurait il laissé un coeur percé d'une flèche de Cupidon sous les décombres ?
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