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Confidences d'Alex
Confidences d'Alex
  • Chronique de la sexualité du jeune Alex. La sexualité ambigüe de son adolescence, ses inhibitions, ses interrogations, ses rêves, ses fantasmes, ses délires, ses aventures, ses expériences.
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23 août 2010

128 Les cousins (épisode intégral)

 

 Mes cousins de Hossegor insistent pour qu’on aille passer quelques jours chez eux. Ça serait sympa un petit séjour sur l’océan pendant un pont du mois de mai, qu’en penses-tu ? demande Clara à Alex, son mari.

 Ouais, mais à condition de coucher à l’hôtel, parce que, si j’ai bien compris, ils n’ont pas un très grand appart.

 Je crois qu’on les vexerait si on allait à l’hôtel. En se tassant un peu on peut tous loger chez eux.

 On va être les uns sur les autres. Tu sais que je n’aime pas ça.

 J’espère bien que tu n’aimes pas être « les uns sur les autres », surtout que la cousine Estelle est très jolie. Je serais très jalouse.

 Jalouse, tu l’es suffisamment comme ça.

Quel âge Estelle ?

 19

 Et son frère ?

 Franck a 16 ans

 Et les parents, ils sont un peu marrants ?

 Tu ne te souviens pas ? A notre mariage ile avaient mis une super ambiance à leur table. Estelle et Franck n’avaient pas pu venir, ce serait bien que tu fasses leur connaissance.

 Et on ferait quoi là-bas ?

 Je ne sais pas moi, visites : Cap Breton, Biarritz, Saint-Jean-de-Luz,… plage, baignade, promenade,… Franck fait du surf, il pourrait t’initier.

 OK, arrange-nous quelque chose là-bas.

................ 

 C’est là. Super ! Ils doivent avoir une super vue sur l’océan. Il est à quel étage leur appart ?

 Tout en haut, au 4°

Accueil on ne peut plus chaleureux. Délicieux diner de fruits de mer et de poissons. Conversation animée, émaillée de bons mots et d’humour. Familiarité naturelle et de bon aloi. Très bonne ambiance.

C’est vrai que la cousine Estelle est très mignonne, et Franck un bel ado déjà bien formé, avantageusement marqué par la pratique sportive. Il  est réservé, attentif, observateur, plein d’humour, et ne la ramène pas comme ces jeunes petits cons qui prennent les aînés pour des vieux ringards.

Une famille apparemment unie et sans gros problèmes, saine, un modèle en quelque sorte, comme on n’en voit plus guère.

Pas question de laisser les invités aller à l’hôtel. On peut très bien s’arranger ici. Il y a un lit une place disponible dans la chambre d’Estelle, et Alex pourrait dormir avec Franck, qui a un grand lit, si ça ne le dérange pas.

 Non, ça ne me dérange pas du tout, répond Alex, dissimulant le trouble qui l’avait envahi.

« Mon Dieu, se dit-il, ils ne savent pas ! Me mettre dans le lit de leur fils ! Un si jeune et si beau garçon ! Ils ne savent pas le risque qu’ils prennent. »

« Mais je sais me retenir, quand même, se dit Alex ! D’ailleurs depuis que je suis fiancé et marié je n’ai plus touché, ni même effleuré un seul garçon. Quand par hasard je surprends mon regard en train de jouer l’émancipé et suivre une mâle silhouette, je le détourne aussitôt de son attention coupable à un trop belle gueule, à de trop excitants petits seins pointant discrètement sous le fin tissu, à la saillie de pectoraux trop bien dessinés, à une taille fine et trop bien prise, à un volume trop suggestif entre les cuisses, souligné par le délavé du jean, à un petit cul bien rebondi trop prometteur,…. Je crains d’éprouver une frustration. J’ai peur de succomber à la tentation. J’ai la frousse d’être repris par mes démons. Ce que je considère maintenant comme mes démons, sans regretter toutefois les avoir fréquentés. Je les chasse parce qu’ils hantent encore mes rêves, et que je redoute qu’ils s’emparent à nouveau de moi. Je les chasse parce que j’aime ma femme, et que je me convaincs qu’elle me comble. »

Une petite odeur de nostalgie l’enveloppa lorsqu’il pénétra dans la chambre du jeune garçon. Il revit la sienne, tapissée des posters de ses chanteurs préférés, des photos des acteurs et actrices les plus sexy. Que d’années  passées, déjà, avec leur cortège de joies et de chagrins ! Ces images du passé ne furent qu’une vapeur fugitive, qu’il chassa d’un sourire. Il était curieux de connaître les engouements d’un jeune de quinze ans, ses idoles, sa collection de cd, ses jeux vidéos…

 Tu joues souvent ?

 Pas tellement. J’suis pas accro. Tu veux essayer ?

 Non. Jouer tout seul, ça ne me dit rien.

(Ils ne connaissent pas encore la Wii, grand succès du Noël 2007, avec ses parties de tennis, de golf, de bowling… où l’on peut jouer à plusieurs)

Franck était debout devant lui. Souriant. Un peu raide. Alex se demanda si c’était spontanément ou intentionnellement qu’il ait porté l’appui sur sa jambe droite, imprimant à son corps un léger mouvement ondulatoire du plus bel effet, partant des cuisses, déplaçant le bassin, inclinant les épaules. Par ce simple mouvement immobile, Alex eut tout à coup la révélation palpable du corps à la floraison printanière de l’adolescent, et à son parfum de sève de jeune rameau bien vert. Comment la grâce d’une discrète cambrure peut-elle faire connaître l’existence des fesses, des reins, du sexe ! C’est fou le sens naturel qu’ont les jeunes gens de dévoiler leurs attraits sans le moindre recours à la coquetterie.

D’une pression entre le pouce et l’index Alex écrasa cette réflexion coupable. Pas question de se laisser entraîner sur ce terrain glissant.

Mais comment se faisait-il qu’il perçoive confusément que Franck n’était pas insensible à phéromones masculines ? Quel sens secret lui faisait lire dans les yeux du garçon une aspiration rentrée à explorer les ressources de la planète charnelle des hommes, dont il ignorait encore les faces cachées ? Où en était-il de ses expérimentations ? Sans doute Franck avait-il découvert assez vite les besoins sexuels d’un corps venant de réaliser sa mutation, et s’était-il adonné à cette pratique de la masturbation, généralisée chez les garçons normalement constitués. Sans doute avait-il compris qu’un partenaire, ou plusieurs, enrichiraient les effets de la pratique solitaire. Peut-être avait-il connu intimement une fille, ou plusieurs, les jeunes s’y prennent très tôt à présent. Peut-être s’interrogeait-il, devant l’éventail de ses attirances et de ses émois, sur sa véritable orientation sexuelle.

Quittant les sentiers de son imaginaire, Alex se rendit compte qu’il ne faisait que cheminer en lui-même, et qu’il poursuivait une aventure qui n’était autre que la sienne.

Franck s’assit sur le lit et commença à se déshabiller, puis il se précipita vers la porte de la chambre qu’il ouvrit d’un geste vif :

─ La salle de bain est libre. Tu y vas si tu veux, et je la prends après toi.

Quand Franck partit à son tour, Alex suivit des yeux cette silhouette encore un peu fluette mais pareille aux arbres en fleurs promettant la saveur de leurs fruits gorgés de jus savoureux. Franck avait jeté négligemment son t-shirt sur le lit. Ce bout de tissu ocre jaune parsemé d’inscriptions eut tout à coup, dans la pensée d’Alex, la puissance d’une dépouille de jeune félin. Il lui sembla qu’il lui suffirait de toucher le tissu encore tiède pour qu’il se réchauffe et se gonfle de tous les jeunes muscles du garçon.

Lorsque Franck rentra dans la chambre, son corps se dessina un instant dans l’encadrement de la porte en de mouvantes et souples lignes courbes qui s’imprimèrent aussitôt dans ce qu’Alex appelait son « répertoire de beauté ». L’espèce de douce caresse du très bref coup d’œil d’Alex balayant son corps de haut en bas n’échappa pas au jeune garçon. Alex eut alors envie de lui faire un compliment :

─ Tu es beau garçon, tu dois avoir du succès.

Franck rougit, mais reprit aussitôt contenance en détournant cette invitation à la confidence :

─ J’aimerais être musclé comme toi.

─ Mon petit Franck, il y a d’autres objectifs plus importants dans la vie. Moi je crois que j’aimerais avoir à nouveau ton âge. Il y a un tas de choses que j’ai loupées.

─ J’ai pas de pyjama, ça t’ennuie si je dors en slip ?

─ Moi non plus je ne connais pas le pyjama. Je dors nu d’habitude.

─ Surtout fais comme chez toi.

─ Tu rigoles ! En slip, comme toi.

─ Tu préfères le côté gauche ou le côté droit ?

─ Egal

─ C’est la première fois que j’ai un garçon dans mon lit.

Alex fut interloqué par cette liberté d’expression chez un jeune de seize ans.

Il lui répondit en souriant :

─ J’espère que ça ne t’empêchera pas de dormir.

─ Bonne nuit Alex

─ Bonne nuit.

Pourquoi Alex se sentait-il comme électrisé ? Il n’était pas seulement couché dans le lit de Franck dont il croyait percevoir le rayonnement de la juvénile ardeur, il se sentait devenir Franck lui-même, sans doute parce qu’il décelait, bien qu’il le connût si peu, un tempérament, un comportement, une personnalité proches des siens. C’est ainsi qu’il se laissa glisser dans la peau et dans le cœur de l’ado, et rencontra cet autre sans altérité puisque c'était lui-même. C’est à travers Franck qu’il revécut une partie des tribulations mentales de son adolescence.

Même les vêtements de Franck devenaient siens. Ce jean un tout petit peu trop blanchi pour mieux souligner la forme des cuisses et des fesses, c’est celui qu’il avait porté jusqu’à ce qu’il s’effiloche « à la limite de l’indécence », disait sa mère avec beaucoup d’exagération. Ce boxer bien ajusté, dont les surpiqûres mettaient discrètement en valeur le volume de la coque, était celui qu’il portait alors, et qu’il affectionne toujours autant. Il retrouvait exactement ce souci vestimentaire qui était le sien, non qu’il aimât porter des fringues de luxe ou élégantes, mais des nippes dans lesquelles il se sentait bien parce qu’il avait l’impression qu’elles mettaient son corps en valeur. Bien sûr il ne s’agissait pas d’avoir un look efféminé. Au contraire il fallait compenser cette coquetterie par des allures viriles, un peu brusques, même.

De son corps il était assez content, bien qu’il attendît avec impatience que la masse musculaire fût mieux dessinée et plus développée. Il avait une sorte de bienveillance à l’égard de son corps, dont la simple vue suffisait à l’exciter. Il prenait plaisir à se mettre nu devant la grande glace de sa chambre, et, immanquablement, il se mettait à bander très raide. Il promenait alors des doigts légers sur ses seins, son ventre, ses fesses dont il pénétrait doucement la fente jusqu’à rencontrer une sensation voluptueuse inattendue à cet endroit, avant de gagner la peau soyeuse du scrotum, de palper les deux jumelles à la mobilité un peu espiègle, de flatter le dessous de la verge dressée, de la remonter jusqu’au frein, de passer un index délicat sur le pourtour du gland en étalant le miellat s’écoulant du petit cratère, de vibrer de délicieux petits frissons en sentant les affolantes contractions du pénis, d’empoigner finalement vigoureusement le membre pour l’amener à cracher sa crème de yaourt dans une frénésie de spasmes et un paroxysme de sensations lui arrachant un rugissement caverneux.

Bien souvent il aurait eu envie de partager, ou plutôt de décupler son plaisir avec une partenaire. Alors il s’imaginait contre un corps de fille, parce qu’il était un mâle, un petit mec viril, et qu’il était tout naturel qu’il s’intéressât aux nanas, dont il ne connaissait pas tous les secrets, tant s’en faut. Il choisissait donc de mettre dans ses bras, nue comme il se doit, La plus belle fille de sa classe. Il en dessinait, de main de maître, avec un indéniable talent, l’anatomie idéalement parfaite. Son polochon dressé entre lui et la glace faisait médiocrement office de partenaire. Il s’emparait de ses propres seins, à défaut de pouvoir palper les douces protubérances féminines, et simulait un coït qui l’emportait vite à un fabuleux orgasme. Après il n’y avait plus qu’à nettoyer le polochon et lui rendre son usage habituel.

Mais il lui arrivait aussi, avec un sentiment irrépressible de culpabilité, d’imaginer un partenaire du même sexe que le sien. Pas une de ces petites poules mouillées comme il en avait repérées dans son lycée, qui méritaient le label « pédé », mais un garçon dégourdi, bien viril, au grand corps vigoureux, presque bagarreur. Son dévolu se portait immanquablement sur son ami Marc dont on a déjà beaucoup parlé.

Il était là en terrain défriché. Non qu’il eût davantage pratiqué, non qu’il eût même touché à Marc, mais comme garçon il connaissait les sensations et les réactions du corps mâle, ses zones érogènes, ses appétits, encore qu’il se demandât s’il n’y avait pas des variantes considérables.

Pour l’avoir un peu expérimenté entre potes, comme font beaucoup de garçons de son âge, il savait que le centre érotique des garçons émettait les mêmes signaux, nourrissait les mêmes désirs, succombait aux mêmes tentations, exprimait son bonheur de la même manière que le sien. Mais il se posait néanmoins beaucoup de questions. Il s’interrogeait sur l’amour entre garçons. Ce qu’il éprouvait pour son ami Marc était-il seulement de l’amitié ? Ce plaisir d’être tout près de lui, ce désir de le toucher, de l’embrasser, ce désir de lui, de lui tout entier, n’était-ce pas de l’amour ? Impossible d’en parler bien sûr, et même de se laisser aller à ce sentiment. Aimer un garçon, c’était contraire à ce que lui avait inculqué son milieu bien installé dans les valeurs traditionnelles et les interdits hérités du catholicisme. Lui un inverti, un pédé, une tapette, une tante, une tafiole ? Impossible, impensable ! Il attirerait le mépris et la dérision et serait couvert de honte. Il ruinerait tous les efforts faits jusqu’alors pour se sentit « normal ». Il gardait donc bien enfermé à double tour, au-dedans de lui-même, son secret désir de vivre une relation amoureuse avec son ami Marc. Avec lui seul, parce que c’est lui qu’il aimait. D’ailleurs Marc se conduisait en copain et ne manifestait à aucun moment un désir de plus grande intimité ou de jeux sexuels. C’étaient les filles qui semblaient attirer toute son attention dans ce domaine, quitte à se payer leur tête avec les copains, et avec Alex en particulier.

En fait Alex ne savait pas très bien en quoi consistait faire l’amour avec un garçon. Si, il savait, parce que, quand même, à quinze ans, on sait déjà pas mal de choses sur le sexe. En théorie en tout cas. Ce dont il avait très envie, c’était de prendre cette tête aimée dans ses mains, de passer ses doigts dans la chevelure, de modeler avec ses pouces, comme le ferait un sculpteur dans l’argile, les yeux, le nez, les joues, les lèvres, comme pour être le créateur de ce visage, le démiurge. Être celui qui a créé la beauté de ce visage. Il aurait tant aimé y déposer des baisers ! Il avait besoin d’être tout contre cette peau mate qu’il n’avait fait qu’apercevoir dans les vestiaires. Envie de la parcourir, d’en découvrir la fermeté et la douceur. Passer partout sa langue avant d’atteindre le flambeau de ce corps, démonstratif et impatient. D’où lui venait cette folle tentation de prendre le sexe de Marc dans sa bouche, de sentir la douceur et la réceptivité de la peau avec ses muqueuses, de l’envelopper de sa chaleur intime et de le faire glisser dans sa cavité buccale pour lui donner du plaisir.  Oui, il saurait faire instinctivement, bien que ce soit la première fois, les mouvements qui donnent le plaisir. Mais ce faisant, ne jouerait-il pas le rôle d’une femme ? C’était sa grande interrogation quand il s’agissait de sexe. Dans l’amour entre garçons, y avait-il un homme et une femme, un dominant et un dominé, un mec et une lope ? Si les caresses en tous genres de la bistouquette pouvaient être naturellement vouées à la réciprocité, en allait-il de même pour l’introduction dans les entrailles du partenaire ? Cette introduction était-elle inévitable d’ailleurs ? S’il trouvait super excitantes les petites fesses de garçons, il avait du mal à imaginer sa canne pénétrer cet orifice nauséabond pour en ressortir enrobée d’excrément. L’idée le révulsait, il trouvait ça dégoûtant. Quant à inverser les rôles, il en rejetait la pensée. Il ne supportait pas de s’imaginer prendre des poses particulièrement inesthétiques et même laides et humiliantes, et surtout, surtout, il ne pouvait tolérer de se comporter comme une femme.

Ce corps, son corps, dont il était assez satisfait, il avait fortement le désir de le soumettre à l’appréciation des autres. Un besoin, sans doute, d’être conforté dans son estimation par des regards approbateurs, envieux, des regards de convoitise. Etait-ce de l’exhibitionnisme latent ? C’était plutôt un fantasme qui le portait à l’excitation, car une pudeur et une réserve naturelles le plongeaient dans la gêne et l’embarras dès qu’il fallait se déshabiller dans les vestiaires de gymnases ou de piscines, et en particulier quand il fallait se mettre nu pour entrer dans les douches collectives. On se souvient qu’il avait la hantise de bander en ces circonstances et d’être l’objet de moqueries égrillardes, au point d’être inhibé.

Mais cette nuit, dans la peau de Franck, car ne l’oublions pas, c’est à travers lui qu’il revivait ses sensations adolescentes, il se sentait plus libéré, plus décontracté vis-à-vis de la nudité de ce jeune corps. Les ados auraient-ils maintenant moins de mal à se désaper ? Il en doutait fermement, les incertitudes, les doutes, les questionnements de l’adolescence, la crainte des moqueries et des grivoiseries des autres garçons et filles, la montée en puissance de la sexualité, rendaient très difficile une indifférence à se montrer nu. Pourtant il pressentait à cet égard une certaine décontraction chez ce garçon qui dormait à côté de lui, et qui se confirmera le lendemain. En effet, après une séance d’initiation hilarante de son cousin au surf, Franck avait sans embarras, et avec un parfait naturel, enlevé sur la plage sa combinaison puis son slip, avant d’enfiler tranquillement des vêtements secs. Alex avait fait de même, mais en se tournant vers la mer pour dissimuler un début d’érection.

─ Alex, tu dors ?

─ Oui

─ T’es un marrant, toi. Comment peux-tu me répondre que tu dors ?

─ Parce que tu me le demandes.

─ Allez, te fous pas de ma gueule.

─ En tout cas je rêve.

─ Non ! Tu rêves éveillé ? Ça t’arrive souvent ?

─ Tout le temps. Même que je n’arrive pas toujours à démêler la fiction du réel.

─ Génial ! Ça t’évite d’avoir parfois à mentir.

─ Ah bon ! Ça t’arrive, à toi, de mentir ?

─ Oui. Je ne peux pas tout dire. A mes parents par exemple. Je leur ferais trop de peine.

─ Et à moi tu as envie de dire certaines choses?

─ Oui

─ Je crois deviner : tu aimes les garçons.

─ Oui. Ça se voit tant que ça ?

─ Non, pas du tout.

─ Comment sais-tu alors ?

─ Un peu de flair, peut-être.

─ Un peu d’expérience ?

─ Comment sais-tu ?

─ La façon dont tu m’as regardé, tout à l’heure, et tu m’as dit que j’étais beau.

─ C’est fini tout ça, je suis marié maintenant. Allez, il faut dormir, il est tard et demain matin tu me donnes une leçon de surf, il faut être en forme. Si tu le souhaites, on reparlera de nos confidences.

Ils finirent par s’endormir tous les deux, se tournant le dos, laissant au milieu du lit une zone de no man’s land. Mais dans son sommeil, Alex se retourna et un bras s’abandonna sur l’épaule de Franck. Quoi de plus naturel pour quelqu’un qui a pris l’habitude de dormir avec sa femme ? Seulement ce corps à côté de lui n’est pas le corps de sa femme, c’est celui de son cousin auquel il n’est pas question qu’il touche. Mais que reste-t-il de sa volonté une fois endormi ? Les sens sont-ils débranchés, eux aussi ? Probablement pas, et ils réservent, on le sait, de curieuses surprises.

Il dormait sans le savoir, tout en sachant que dans son sommeil il était éveillé. Cette phrase ubuesque traduit bien cet onirisme délirant dans lequel Alex était plongé, tel qu’il me l’a rapporté et que je m’efforce de relater. Il faut s’attendre à ce que les mots forment des phrases paraissant absurdes pour qui en fait la lecture en étant éveillé. Il en serait tout autrement si l’on avait affaire à un lecteur endormi. Bref, Alex se mit à penser qu’il retrouvait la créature de rêve qu’il n’avait jamais vue, mais dont l’existence était une certitude de son imagination. Ce qui le déconcerta fut qu’elle avait ôté le visage qu’il lui avait toujours connu, qui en réalité était un masque, et que son vrai visage était rigoureusement identique au précédent. Sans doute s’agissait-il d’un stratagème comme en sont friands les protagonistes imaginaires du théâtre des rêves quand ils veulent s’immiscer dans la vie réelle. Devant cette imprévisible rencontre, il se sentit pousser des ailes de papillon et se mit à faire de grandes envolées lyriques dans lesquelles il mit tant de passion que les habituelles et banales déclarations d’amour firent une tronche de papier mâché où les mots n’eurent plus aucun sens puisqu’ils n’existaient plus.

Sous son vrai visage, le corps dépouillé des voiles, des draperies ou autres feuilles de vigne qui en altéraient l’éblouissante harmonie, cette créature était plus divine qu’il l’avait façonnée. Impossible de faire la description d’une pareille beauté. Tous les top-modèles et les acteurs les plus sexy pouvaient aller se rhabiller. Même en allant chercher du renfort du côté des dieux et des déesses athéniens, bien connus pour leur beauté idéale, on ne pouvait trouver d’équivalence. Cette beauté est monnaie courante dans certains romans, se dit Alex, mais tout à fait exceptionnelle dans la vie réelle. Il était sous le charme d’un véritable enchantement, il avait enfin franchi la porte d’entrée dans le monde réel des sortilèges. Exalté, grisé d’allégresse, ivre de jubilation, il laissa son cœur s’épancher en divagations impudiques, et prononça des mots inarticulés qui sortirent bêtement mêlés et enchevêtrés de sa gorge, au lieu de composer la belle gerbe multicolore de son émerveillement.

Il s’approcha pour mêler son corps à cette merveille, pour emboîter l’un dans l’autre ces deux corps jusqu’à la fusion complète  des peaux et des muscles… Il s’approcha le sexe en avant, dressé et pointé, mais au moment du contact une étincelle de court-circuit se produisit et instantanément, mais sans déflagration, ce beau visage et ce beau corps se réduisirent à une peau de chagrin verdâtre et plissée, s’abîmant dans des mucosités blanchâtres un peu gélatineuses comme du sperme.

Il poussa un hurlement muet et perdit le contrôle des images oniriques. Il se réveilla en sursaut et fut épouvanté de se trouver plaqué contre le corps de Franck, en bandant comme un âne. Il s’en écarta précautionneusement pour ne pas réveiller ce jeune corps qui semblait endormi, et se réfugia à l’extrême bord du lit.

Dans la matinée il entendit Franck se lever et aller sans faire de bruit dans la salle de bain. Il était un peu gêné de ce qui s’était passé cette nuit, mais pas plus que ça. D’abord, Franck pouvait très bien ne s’être aperçu de rien, plongé dans son sommeil et dans ses rêves. Mais s’il était éveillé ? Alors là, Alex inventoriait toutes les possibilités qui s’étaient offertes à lui.

La première était de considérer qu’il s’agissait là du comportement normal d’un jeune mari qui a l’habitude d’enlacer sa femme au cours de son sommeil, et de se dégager discrètement de l’étreinte.

La seconde était de révolte. Il bondissait hors du lit en faisant la vierge effarouchée et en criant au viol. Pas du tout son genre.

La troisième était plus conforme à sa nature : il repoussait doucement mais fermement le trop tendre agresseur. Il n’était pas mûr pour entreprendre une aventure sans lendemain où il abandonnerait la dépouille de son innocence.

La quatrième possibilité n’était pas à l’honneur du « tendre agresseur ». Alex prétextait le sommeil pour se laisser aller à son envie sans toutefois oser le faire ouvertement de crainte de se faire jeter.

La cinquième était la plus dangereuse : Franck faisait semblant de dormir et attendait, avec un peu d’anxiété, mais une curiosité résolue, la suite des opérations entreprises par cet attirant intervenant. Attirant parce qu’il avait de l’acquis, sans aucun doute du savoir-faire, et apparemment une sensualité pleine de tact et de retenue, de nature à faire l’expérience, sans trop d’appréhension, d’une toute première fois.

Alex le regarda revenir de la salle de bain, satisfait qu’il ne fût pas nu, et même presque entièrement habillé. Ce n’était pas le moment d’éveiller sa libido.

─ Salut. Tu es réveillé. Tu as bien dormi ? Je peux mettre un peu de musique ?

─ Oui. Qu’est-ce que tu aimes ?

─ Tu vas voir. Entendre, plutôt.

Il brancha son mp3 sur la chaîne et le rock mélodieux et doux de « Dreaming Out Loud », l’album de One Republic, envahit la pièce.

─ J’adore cette musique. En particulier « All I Need », et surtout « Apologize », ce petit chef d’œuvre. Je la passe sans arrêt.

(NDLR L’auteur fait ici un tout petit anachronisme puisque la scène se passe en 2003 et que l’album n’est sorti que fin 2007. Sans doute l’auteur avait-il envie de parler de ce disque qu’il aime particulièrement. A toi lecteur de choisir une musique rock équivalente. Coldplay, peut-être.)

─ Dis-moi Franck, tu m’excuseras pour cette nuit. Je me suis réveillé contre toi.

─ Oui, j’ai bien senti. Y a pas d’mal. C’était agréable.

─ Je ne voulais pas.

─ J’t’assure, ça m’a plu. Ça m’a même vachement excité. Je n’ai jamais couché avec un garçon.

─ Arrête Franck. Tu réserveras ça à ton premier amour.


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