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Confidences d'Alex
Confidences d'Alex
  • Chronique de la sexualité du jeune Alex. La sexualité ambigüe de son adolescence, ses inhibitions, ses interrogations, ses rêves, ses fantasmes, ses délires, ses aventures, ses expériences.
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10 février 2009

114 Lalo le mauricien ( 4/9 )

─ C’était comment ?
─ Cérémonieux.
─ Tu n’as pas l’air très attristé.
─ Je le connaissais à peine. Mais il fallait que j’y aille.
─ Je te trouve plutôt l’air guilleret.
─ C’est à cause des réflexions que je me suis faites tout au long de la cérémonie, pour passer le temps.
─ Raconte-moi un peu.
─ J’avais l’œil reniflard. Son épouse ! Ça m’épate que cette jeune fille ait épousé ce vieux type. Pas même friqué ! Un pied dans la tombe déjà. Le cimetière comme villégiature. Le soir, au lit, il devait lui raconter des histoires de fantômes. Il ne m’étonnerait pas qu’il ait lu son propre article nécrologique. On dit d’ailleurs que ça fait vivre plus longtemps, que ça donne un nouveau souffle. Marrant, non ? Et puis je me disais, devant ce beau cercueil en bois des îles, avec ses garnitures dorées à l’or fin, qu’il devait être fier là-dedans, qu’enfin il était maître chez lui. Dans le capiton et la soie il était dans ce luxe auquel il avait aspiré toute sa vie. Quel gaspillage ! On ferait mieux d’utiliser l’argent pour venir en aide à ceux qui en ont besoin. Ceux qui meurent de faim, par exemple, et qui ne font que multiplier le nombre de cercueils. Ne pourrait-on, pour éviter cette gabegie, utiliser un cercueil dont le fond s’ouvrirait comme celui des conteneurs à récupération du verre, pour vider son contenu dans le caveau ? Ainsi le même cercueil pourrait servir à plein de gens, et le prix de revient d’un enterrement serait nettement allégé. Mais il y aura toujours des cadavres pour refuser un cercueil qui a déjà servi à d’autres. Trop d’individualisme. Chacun veut sa boîte et se sentir bien dedans. Comment leur dire que les sensations, c’est fini ? Ça doit faire un choc de ne plus rien sentir du tout. Au début ça doit être extrêmement désagréable, mais peut-être qu’on s’y habitue.
Qui est celui-là avec cette allure d’enterrement ? On dirait que son visage a été mâché et recraché. T’as vu ses yeux ? Des œufs pochés sur canapés. Et ses membres de chauve-souris recouverts d’une cape flottant dans un courant d’air immobile ? Peut-être est-ce le fantôme du macchabée. Ce doit être génial d’assister à son propre enterrement et de constater, derrière ces masques de circonstance, la rareté des véritables affligés. Il y a ceux qui seront ravis de prendre la place du mort, je veux dire dans la vie, celle qu’il occupait avant de casser sa pipe. Il y a si longtemps qu’ils attendent ce moment ! Mais ils sont plusieurs à se lancer dans la bataille, et il y aura sans doute des morts ; il y a ceux qui envisagent déjà le bon usage qu’ils vont faire de l’héritage, avec quelque inquiétude cependant, figurent-ils sur le testament ? Et puis s’il faut répartir entre tous le peu de biens qu’il avait, dont la moitié revient à son épouse, il y aura juste de quoi se payer un bon restaurant ; il y a les ennemis, déclarés ou non, qui sont désemparés parce que le combat s’arrête faute de combattant et que sa mise à mort ne pourra plus avoir lieu ; il y a la veuve éplorée qui n’envisage pas la vie sans un vivant, un vivant cette fois bien chaud et bien ardent, sans toutefois que son ardeur aille jusqu’à réveiller le mort ; Et, bien sûr, il y a toute la kyrielle des indifférents, dont je suis.
─ Dis donc, tu t’es bien marré à cet enterrement.
─ Ça m’a évité de m’ennuyer.
─ La veuve, jolie femme ?
─ Tiens, tu t’intéresses aux femmes maintenant, petit dévergondé !
─ T’inquiète pas, je vais pas te faire mon coming out hétéro.

À suivre ...

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