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Confidences d'Alex
Confidences d'Alex
  • Chronique de la sexualité du jeune Alex. La sexualité ambigüe de son adolescence, ses inhibitions, ses interrogations, ses rêves, ses fantasmes, ses délires, ses aventures, ses expériences.
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21 avril 2008

098 Hugo

« Que savais-je de lui ? » demanda Alex en se posant la question à lui-même. « Il était peintre, ou plutôt étudiant peintre.
Il faisait des peintures de grand format avec de vastes plages colorées à la texture très travaillée, localement meurtries de griffures nerveuses.
J’avais l’impression qu’il détruisait ainsi, anéantissait tous les efforts qu’il avait consentis pour réaliser cette belle matière picturale. Ces balafres prenaient parfois l’apparence de calligraphies illisibles. A d’autres moments elles avaient un côté humoristique, évoquant, de très loin, un monde de petits animaux rocambolesques.
Je me demandais quel était le sens de ces blessures. Je comprenais, sans l’excuser, qu’on griffe une belle porte fraîchement laquée ou qu’on tague un mur nouvellement enduit sur cette grande maison bourgeoise ou sur ce tribunal d’instance. Certains trouvent toujours de fausses bonnes raisons pour dégrader : l’envie, la hargne, la vengeance, le mal-être, le désespoir, le marquage d’un territoire, comme ces animaux qui pissent pour délimiter une aire bien à eux.
Mais ce garçon griffait ses propres réalisations, et semblait satisfait du résultat. Certes, il n’était pas le premier à le faire. On connaît les compositions lacérées et griffées de Tapiés, peintre barcelonais, ses « champs de batailles où les blessures se multiplient à l’infini », qui évoquent l’expression d’un monde déchiré et angoissant. Mais cette conscience tragique du monde ne me paraissait pas miner ce garçon avenant, sympathique, enjoué, confiant.

─ Ça me vient comme ça, me dit-t-il quand je lui posai la question. C’est comme un besoin d’abîmer ce que j’ai fait de trop joli, de trop réussi, de trop consensuel.

J’écoutai à peine ce qu’il me disait, tant j’étais fasciné par la beauté de son visage. Je le voyais très bien poser pour des magazines de mode un peu chics, comme Vogue Hommes par exemple. Il avait un type très particulier de méridional mâtiné de catalan. Très brun, la peau mate, les cheveux courts très légèrement ébouriffés par un gel brillant, des yeux d’ébène sous l’arc noir des sourcils, un regard direct, franc et lumineux, que tu sens couler en toi comme un nectar revitalisant. Des pommettes hautes légèrement marquées, une barbe mal rasée ombrant la concavité des joues, venant souligner un menton très viril, encadrant des lèvres charnues particulièrement sensuelles lui donnaient un charme fou. Pas très grand mais svelte et élancé, il me paraissait, bien que son corps me soit inconnu, avoir le physique d’un superbe mannequin.
Mais il semblait n’en avoir cure. Il s’habillait n’importe comment et sa seule excentricité était sa coiffure. Il semblait vivre dans sa sphère artistique, dans sa thébaïde picturale, et être étranger à toute autre préoccupation.

Je l’avais connu petit garçon, mes parents étant amis des siens. A l’époque je le trouvais déjà très mignon, mais j’étais le « grand » et du haut de mes quinze ans je regardais ce petit mioche avec condescendance. Ses parents avaient déménagé et je ne l’avais pas revu.

Un jour, je reçus un carton d’invitation pour un collectif de jeunes espoirs de la peinture sur lequel figurait son nom. Par curiosité je me rendis à ce vernissage.
Quelle ne fut pas ma surprise de voir un splendide garçon venir vers moi en souriant et m’appeler par mon nom. Comment m’avait-il reconnu après tant d’années, lui qui n’avait que huit ou neuf ans quand nous nous étions perdus de vue ? Mystère.
Le contact fut très facile, et presque chaleureux. Il me présenta ses peintures, dont je lui fis des compliments, un peu convenus sans doute, après les avoir regardées attentivement. En fait je n’étais pas très sensible à ce genre de peinture abstraite, mais en revanche le garçon m’intéressait énormément. »

À suivre...

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